Diamant bleu de la Couronne

Le diamant bleu de la Couronne, toujours nommé Bleu de France, est un grand diamant bleu de Louis XIV. Il est rapporté d'Inde en 1668, retaillé par Pitau en 1673 et volé en 1792.


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  • ... des Joyaux de la Couronne en septembre 1792. Le «diamant bleu de la Couronne» est-il le diamant «Hope» volé et retaillé secrètement ?... (source : iledefrance-est.cnrs)

Le diamant bleu de la Couronne, toujours nommé Bleu de France, est un grand diamant bleu de Louis XIV. Il est rapporté d'Inde en 1668, retaillé par Pitau en 1673 et volé en 1792. Son modèle en plomb, découvert peu avant Noël 2007, prouve que ce diamant de la Couronne est à l'origine du diamant Hope apparu en Angleterre après le vol. Il reste le plus gros diamant bleu jamais découvert à ce jour, même après la découverte des fabuleux gisements d'Afrique, de Sibérie, d'Australie, du Brésil ou du Canada.

Histoire

Dans les années 1668, un certain Jean-Baptiste Tavernier revient du sultanat de Golconde (maintenant une cité-forteresse en ruines près de la localité actuelle d'Hyderabad, dans l'état indien d'Andhra Pradesh) avec une série de très beaux diamants[1]. Le plus grand de ces diamants pesait 112 et 3/16 carats de l'époque, soit 115, 16 carats métriques modernes. Il s'agissait à l'époque du plus grand diamant bleu connu, aussi connu sous le nom de «diamant bleu de Tavernier». Malgré le fait qu'il est écrit que le diamant semble avoir été extrait dans les années 1610 de la mine Kollur (ou Gani en Telugu) près de Golconde, on n'en a aucune preuve. Le diamant avait été repoli suivant l'usage indien de l'époque, c'est-à-dire suivant les faces naturelles de cristallisation et de clivage du diamant. On cherchait à garder la gemme la plus grosse envisageable, aux dépens de la brillance.

Gravure des mémoires de Tavernier, montrant le grand diamant bleu ramené des Indes, dessiné sous trois angles.
Réplique en zircone bleue du diamant bleu de Tavernier, taillée aux USA par Scott Sucher sur la base des gravures de Tavernier de 1676.

La retaille du diamant indien

En décembre 1668, Tavernier revint en France avec une série de diamants, dont le grand diamant bleu foncé et deux autres d'un bleu plus clair. En 1669, Tavernier vendit le diamant bleu à particulièrement bon prix à Louis XIV. En 1671, le roi ordonna que la gemme fut retaillée dans le goût occidental de l'époque, c'est-à-dire pour perfectionner sa brillance. La lourde responsabilité de la taille du diamant bleu de Tavernier incomba au sieur Pitau, le joaillier de la cour[2]. Jean Pitau a sans doute proposé un dessin exceptionnel pour convaincre le roi et Colbert de financer la taille à un prix équivalent à un dixième à peu près du prix d'achat du diamant de Tavernier. Après deux ans de travail, le diamant de Tavernier était retaillé sous une forme triangulaire. Le nouveau diamant fut nommé par Colbert le «diamant bleu de la Couronne» («French Blue» pour les anglicistes). Il pesait 69 ± 0, 02 carats[2]. Ce diamant était un chef d'œuvre de travail lapidaire, dû surtout à sa double symétrie impaire (d'ordre 3 et 7) et la perfection de sa taille. Le diamant était serti dans une sorte de broche que le roi portait à son foulard («cravate»).

La taille du diamant bleu rappelle le symbolisme de Louis XIV voulu à Versailles : présence d'un soleil de facettes arrières de symétrie 7 : on y voit le culte d'Apollon (chiffre 7), le roi-soleil de droit divin (chiffre 7) brillant dans le ciel bleu (du diamant).

La Toison d'or de la parure de couleur de Louis XV

La Toison d'or de la parure de couleur (dessin par Lucien Hirtz pour Germain Bapst, 1889) montrant le diamant bleu de la Couronne, seule source connue jusqu'en 2007 de ce diamant mythique.

En 1749, Louis XV demanda au joaillier Pierre-André Jacquemin (1720-1773) d'inclure le diamant bleu dans l'insigne de l'ordre de la Toison d'Or de la parure de couleur du roi[2]. Louis XV possédait un certain nombre d'insignes de la Toison d'Or, mais deux étaient spécifiquement magnifiques. La Toison dite de la «parure blanche» se compose de quatre grands diamants (dont le très beau second Mazarin de 25, 37 carats) et de nombreux autres plus petits (175 mais aussi 80 rubis ; le tout évalué en 1791 à 413 000 livres). Quant à la Toison de la parure de couleur, elle présentait un feu d'artifice de grandes gemmes de couleur (jaune mais également bleu, blanc et rouge). M. Horovitz possède deux gravures de cette deuxième Toison, qui semblent avoir été proposées par Jacquemin au souverain, dont une avec le diamant bleu. La version finale de la Toison d'Or de la parure de couleur contenant le diamant bleu est en particulier connue par le moule en plomb que réalisa certainement Jacquemin après avoir fabriqué le joyau. C'est ce plomb que Germain Bapst (1853-1921) fera publier[3]. Malgré diverses recherches, cet objet majeur n'a pas encore été retrouvé. Cette insigne magnifique, chef d'œuvre absolu de l'orfèvrerie rococo, comprenait le superbe diamant bleu qui, selon cette tradition chevaleresque, «protège» la toison d'or elle-même (et ses 112 diamant peints en jaune) des flammes (serties de 84 diamants peints en rouge) crachées par un dragon en «rubis balay» (spinelle) de 107, 88 carats. Ce dragon est la «Côte de Bretagne», retaillée ainsi pour cette occasion par Jacques Guay (1711-1793) et visible au Louvre, seul vestige de cet insigne. Le grand brillant «Bazu» de 32, 62 carats et d'une «eau légèrement céleste»[4], trois «topazes d'Orient» (saphirs jaunes), quatre diamants en forme de brillants de 4-5 carats et la bagatelle de 282 diamants décorent la queue et les ailes du dragon mais aussi des deux palmes qui entourent le dragon sans oublier les deux bélières de l'insigne. L'insigne avait été évalué à plus de trois millions de livres durant la Révolution, rien que pour les gemmes[4].

Le vol de 1792

Hélas, la Toison d'Or et son grand diamant bleu furent volés lors du sac dramatique de l'hôtel du Garde-Meuble entre les 11 et 16 septembre 1792. La très grande majorité des joyaux de la Couronne qui y étaient exposés ont été dérobés pendant cinq jours par une trentaine de brigands. La publication et la diffusion de l'inventaire en 1791 par une première République légèrement naïve a sans doute fini de convaincre les voleurs d'agir en des temps troublés par la destitution du Roi, les massacres de septembre et l'invasion par l'est des austro-prussiens commandés par le duc Charles-Guillaume-Ferdinand de Brunswick et décidés à rétablir la monarchie en France. Quoique la majorité des grandes gemmes royales seront heureusement récupérées (dont les diamants Sancy et Régent), les plus grands insignes royaux de chevalerie (les joyaux de la Toison d'Or et Saint-Esprit) mais aussi de nombreux objets majeurs (épée de diamant de Louis XVI, la «chapelle de Richelieu» etc. ) disparurent définitivement.

Origines obscures du diamant Hope

Le diamant Hope s'insère idéalement dans le modèle en plomb du diamant bleu du Muséum (en filigrane, à peu près 31 x 26 mm).

Vingt ans après, un diamant bleu de 45, 5 carats apparaît outre-Manche. La gemme est décrite par John Francillon (1744-1816), un lapidaire londonien, avec la permission d'un certain Daniel Eliason (1753-1824), un négociant de diamants de la même ville[2], [5]. Cette «apparition» correspond précisément à vingt ans et deux jours après le sac du Garde-Meuble, c'est-à-dire deux jours après la prescription légale du vol[6]. Étonnamment, il a fallu attendre Barbot en 1856 pour lire que ce «nouveau» diamant aurait envisageablement été retaillé depuis le «diamant bleu de la Couronne». Le premier propriétaire véritablement reconnu de ce «nouveau» diamant bleu est Henry Philip Hope (1774-1839), qui donnera par conséquent son nom à la gemme. Le diamant alla de propriétaire en propriétaire, jusqu'au moment où il fut généreusement donné par Harry Winston (1896-1978) à la Smithsonian Institution de Washington en 1958. Selon le Gemmological Institute of America, le diamant Hope (45, 52 carats) est un diamant bleu unique («fancy bleu-gris sombre» avec particulièrement peu d'inclusions - VS1).

Recherches récentes en France ainsi qu'aux États-Unis

De nombreuses recherches ont cherché à déterminer si le diamant Hope fut effectivement retaillé à partir du diamant bleu de la Couronne pour dissimuler son origine française[2], [7]. Ce travail implique des modélisations précises à trois dimensions du diamant bleu de la Couronne. Hélas, ce diamant mythique français n'est exactement connu que par une série de deux gravures de Lucien Hirtz, publiées par Bapst en 1889. Dans son anthologie des Joyaux de la Couronne de France, Morel s'essaie à une reconstitution de ce diamant, en se basant sur ces deux gravures de Bapst. Morel a un peu mais significativement étiré le dessin de Hirtz du diamant bleu aux dimensions de Brisson pour qu'il puisse contenir le diamant Hope[8]. Par conséquent, les études récentes américaines montrant que le Hope était «définitivement» retaillé à partir du diamant bleu de la Couronne[7] sont assujetties aux erreurs intrinsèques de Brisson. Kurin en 2006 signale que ces imprécisions suggèrent qu'un modèle fiable du diamant bleu de la Couronne doit être réputé pour définitivement trancher cette question[5].

Dernières découvertes

Le modèle en plomb retrouvé au Muséum national d'histoire naturelle par Farges à Paris fin 2007 (environ 31 x 26 mm)
Diamantbleu.ogv
Reconstitution sur ordinateur du diamant bleu de la Couronne, tel que taillé par Jean Pitau pour Louis XIV en 1673 et serti dans l'or (environ 31 x 25 mm)
La Toison d'or de la parure de couleur, version 1 de 2008, reconstituée par Monney, Horovitz et Farges (environ 16 x 6 cm)
Présentation de la Toison d'or de la parure de couleur, version 2010, par H. Horovitz (gauche) et F. Farges (droite) à l'Hôtel de la Marine à Paris le 30 juin 2010
La Toison d'or de la parure de couleur, version 2010

Par une coïncidence temporelle assez extraordinaire, l'unique et unique modèle en plomb du diamant royal français a récemment été découvert en 2007 dans les collections du Muséum national d'histoire naturelle de Paris[9]. Cette découverte a pu montrer que le diamant bleu était bien mieux taillé que ce qu'on pensait jusque là. Le modèle montre aussi que le diamant Hope en est probablement issu, retaillé entre 1792 (date du vol du diamant français) et 1812 (date d'apparition du diamant bleu anglais) [10]. Finalement, il semble, selon les archives du Muséum que c'est Henry Philip Hope qui a possédé le diamant volé et le diamant retaillé à sa mort en 1839. Il apparaît par conséquent comme la personne au centre de la retaille du diamant bleu entre 1792 et 1812 ; les joailliers londoniens Eliason et Françillon ayant servi de prête-nom pour dissimuler le propriétaire effectif du diamant volé.

À la redécouverte du chef d'œuvre de l'art lapidaire baroque français

L'étude précise du plomb montre que le diamant a été taillé de manière quasi optimale pour valoriser l'éclat naturel du diamant bleu, en créant des facettes autour du mythique angle de 41°, connu être le plus favorable pour la taille des diamants et qui est sensé avoir été introduit avec le diamant dit Régent. Les proportions de la taille de ce diamant en fait un précurseur des diamants modernes taillés en brillant quoique cette taille reste typiquement baroque. Au contraire de ce que les experts américains pensaient, le diamant est bien plus brillant, grâce à la technique de Jean Pitau. Son chef d'œuvre, quoique massacré entre 1792 et 1812 a pu être reconstitué sur ordinateur grâce à un scan sur Anvers du modèle en plomb associé à une colorisation issue du diamant Hope de Washington, gracieusement apportée par la Smithsonian Institution (Jeffrey Post) et qui fut mesurée en spectroscopie optique.

La mythique toison de Louis XV a aussi été reconstituée en gouache. Ce bijou est le chef d'œuvre ultime de la bijouterie française du XVIIIe siècle dont il ne reste pas grand chose. Chef d'œuvre composé de chefs d'œuvre, elle comprend le mythique diamant bleu de Jean Pitau taillé en 1673 mais aussi le dragon dit "Côte de Bretagne" retaillé par Jacques Guay en 1750 pour cet insigne. La totalité du bijou comporte un autre diamant bleu sommital, nommé "Bazu" et de couleur un peu bleutée pesant 32 carats, qui fut aussi volé en 1792 et dont on ne sait pas ce qu'il est devenu. Trois topazes d'orient, une demi douzaines de brillants de 4-5 carats mais aussi pas moins de 472 brillants de plus petite taille finissent le bijou. Les brillants des flammes du dragon étaient peints en rouge à leur envers mais aussi ceux de la toison, peints en jaune selon une technique bien spécifique (issue du fait que les diamants de couleur, surtout rouges, étaient fort rares à l'époque). Cette toison a été portée par Louis XVI lors des États généraux de 1789. Louis XV s'est fait une autre toison, dite de la parure blanche et composée que de diamants blancs (dont les grands diamants "PInder " et "Richelieu") ou faiblement teintés sauf les flammes qui étaient en rubis. Cette toison a aussi été volée en 1792 et retrouvée partiellement démontée sur Paris quelques temps après mais pas gardée. On ne possède aucun dessin de cette toison, tout aussi fabuleuse.

Le 30 juin 2010, Herbert Horovitz, joaillier genevois et François Farges, professeur au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, ont présenté la reconstitution de la grande Toison d'Or de Louis XV. Après 3 ans d'un complexe travail au sein des archives, sur ordinateur et dans divers ateliers en Suisse, France, Inde ainsi qu'aux USA, la nouvelle Toison fut présentée dans les locaux de l'Hôtel de la Marine, précisément là ou elle fut volée en septembre 1792 (voir ci dessus). 218 ans après, ce dramatique vol, qui aliena les trésors de grands maîtres français de la joaillerie, tels Jean Pitan, Jacques Guay et Pierre-André Jacqumin, le mal était en partie réparé. Le bijou fini fut conçu avec les meilleurs artisans lapidaires, sertisseurs, doreurs, gainiers. Un écrin en maroquin cramoisi, aux armes de Louis XV de la maison Simiez fut aussi conçu pour présenter ce sublime insigne. En face d'un auditoire prestigieux, tous remarquèrent l'extraordinaire beauté du bijou, son élégance dans les proportions et ses asymétries florales typiquement rocaille. Chef d'œuvre composé de chefs d'œuvre tels le "diamant bleu de la Couronne", l'insigne témoigne de l'extraordinaire savoir-faire d'artisans du XVIIe et du XVIIIe siècles dont particulièrement peu d'œuvres ont survécu aux vols, aux retailles ainsi qu'aux dégradations du XIXe siècle. Espérons qu'un musée en devienne l'acquéreur pour que le public puisse à son tour contempler ce témoignage de l'art français des périodes baroques et rocaille.

Un roman historique, Le Diamant Bleu (M. Lafon, 2010) par François Farges et Thierry Piantanida raconte ce triple polar scientifico-historique autour du plus fabuleux diamant de l'histoire, qui hatisa passions et peines, fidélités et trahisons sur trois siècles et trois continents.

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. J. -B. Tavernier, Les Six Voyages de Jean-Baptiste Tavernier, Clouzier, 1676.
  2. B. Morel, Les Joyaux de la Couronne de France, Fonds Mercator, 1988.
  3. G. Bapst, Histoire des Joyaux de la Couronne de France, Hachette, 1889.
  4. J. -M. Bion, F. -P. Delattre, C. -G. -F. Christin, Inventaire des diamans de la couronne, perles, pierreries, tableaux, pierres gravées, et autres monumens des arts & des sciences existans au garde-meuble […], Imprimerie nationale, 1791.
  5. R. Kurin, Hope Diamond : the legendary history of a cursed gem, Harper Collins, 2006.
  6. Winters, 1991
  7. N. Attaway, Lapidary Journal, nº ?, nov. 2005, p. 24-28.
  8. M. J. Brisson, Pesanteur spécifique des corps, Imprimerie Royale, 1787.
  9. F. Farges, S. Sucher, H. Horovitz et J. -M. Fourcault, Deux découvertes majeures autour du diamant bleu de la Couronne, revue de gemmologie, nº 165, p. 17-24, 2008.
  10. Communiqué de presse du Muséum national d'histoire naturelle de Paris

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